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tv8.ch 23/11/2011

La mort dans l’âme

Par Frank Rousseau

La saison 3 de Mentalist s’est achevée sur un retentissant coup de théâtre. Petite mise au point avec Simon Baker, le bel Australien qui aime à mettre son grain de sel dans les aventures de Patrick Jane.

Patrick Jane est un observateur hors pair, un enquêteur aussi taquin qu’infaillible, mais ce sont ses démons inté rieurs, le sentiment de culpabilité qui le déchire, son chagrin qui en font un héros si attachant. «Ce sont mes fêlures, mes doutes, mes errances qui ont fait de moi un acteur qui tient la route. Et si, aujourd’hui, je suis en mesure de savourer ce succès, c’est parce que je m’en suis pris plein la gueule!» confie Simon Baker, le comédien qui l’incarne avec brio dans Mentalist. Un comédien australien de 42 ans qui a longtemps galéré professionnellement avant de conquérir le cœur de millions de femmes avec son regard de tendre cocker, son sourire éclatant et ses rides d’expression craquantes mais si peu hollywoodiennes.

Attention, ne lisez pas ce qui suit si vous n’avez pas encore vu le dernier épisode de la saison 3, déjà diffusé sur la TSR, mais pas encore sur TF1.

Patrick Jane a donc tiré à bout portant sur l’homme dont il est persuadé qu’il s’agissait de John le Rouge, l’assassin de sa femme et de sa fille. Un final saisissant, qui va conduire notre héros en prison au début de la saison 4, où il va avoir beaucoup de mal à prouver qu’il a bien abattu John le Rouge car l’arme dont celui-ci l’avait menacé a mystérieusement disparu. Un final dans lequel Simon Baker a tenu à mettre son grain de sel. Alors que Bruno Heller, le créateur de la série, avait prévu qu’il tire trois balles dans le dos de son ennemi juré, l’acteur a insisté pour qu’il l’exécute de face, à bout portant, en le regardant dans les yeux.

Alors, comme ça, il a fini par tuer John le Rouge?
Mais qu’est-ce qui vous permet de dire ça ? D’être si catégorique ? Qui vous dit que c’est bien John le Rouge qui est mort ? 

Comment avez-vous vécu l’idée que Jane passe ainsi à l’acte ?
Lorsque Bruno Heller est venu me parler de cette éventualité, je lui ai dit que j’étais d’accord. Que je trouvais sa démarche intéressante. Tout en lui précisant qu’il fallait respecter le public. Qu’il ne fallait pas que cet épisode, ce tournant, soit un truc au rabais, une scène orchestrée avec de grosses ficelles. Patrick Jane est un être en souffrance permanente. Un homme qui doit vivre avec la mort de sa femme et de sa fille au quotidien. Alors, bien sûr, on aurait très bien pu le présenter comme un Charles Bronson, à la façon d’Un justicier dans la ville. Si cela avait été le cas, je n’aurais pas accepté de jouer dans cette série. Jusqu’à présent, Jane s’est montré fort, digne. J’ai donc dit à Bruno: «Pendant plus de septante épisodes, ce gars a été un héros, un mec irréprochable. On ne va tout de même pas le présenter maintenant comme un salaud.» 

La saison 3 s’était déjà révélée riche en rebondissements, bien plus que la 2. Serait-ce parce que vous avez tapé du poing sur la table pour faire changer les choses ?
C’est un peu exagéré. Disons que j’ai voulu me faire entendre ! (Rires.) Personnellement, je pense que nous commencions un peu à nous mordre la queue dans la deuxième saison. L’intrigue tournait en rond. J’ai pris le parti de faire comprendre à la production que nous devions changer de direction. Nous ne pouvions décemment pas refaire le même épisode chaque semaine. Il fallait se renouveler ou… se saborder ! Selon moi, la troisième saison est un équilibre harmonieux entre l’humour et le drame personnel de Jane. Le problème, dans les séries américaines, c’est qu’on a toujours du mal à mélanger comédie et aspects dramatiques. Soit on fait dans le trop sérieux, soit dans le rigolo. Je pense que là, nous avons démontré que nous pouvions être drôles tout en gardant un ressort dramatique.

Est-ce gratifiant d’être considéré comme l’un des hommes les plus sexy du monde ?
Forcément, il y a une petite partie de moi-même qui se dit qu’il vaut mieux ça que d’avoir été élu l’acteur le plus con de la télévision. Non ? (Rires.) 

Comment vivez-vous votre statut de star? 
Je ne comprendrai jamais les paparazzis. Franchement, quel est l’intérêt de me mitrailler alors que je fais mes courses en famille ou quand je vais chercher mes enfants à l’école ? Je suis un mec désespérément normal, qui mène une vie tout aussi désespérément normale. Si vous passiez quatre jours d’affilée avec moi, vous constateriez à quel point je suis ennuyeux ! Le problème, c’est que la télé et le cinéma faussent tout. Les gens s’imaginent que je prends des bains de caviar et que les robinets de ma salle de bain sont en or massif. On a beau leur expliquer que ce n’est pas le cas, rien n’y fait. Le showbiz est comme une grosse loupe ; il déforme l’image de ce que vous regardez si vous ne prenez pas un peu de recul.

N’en déplaise, votre succès vous a permis d’améliorer l’ordinaire. Quelle relation entretenez-vous avec l’argent ?
J’ai grandi avec des parents constamment fauchés, et ce manque d’argent m’a appris à bien le gérer et à ne pas le dépenser à tout va. Je suis quelqu’un de raisonnable. Je ne mène pas grand train. Je ne vois pas quel est l’intérêt d’avoir douze voitures dans un garage ou huit maisons à travers le monde. Savez-vous ce qu’est le vrai luxe pour moi ? Voir que mes enfants ne manquent de rien, que je suis capable de leur payer de bonnes écoles, des fringues pour les habiller chaudement pour l’hiver, et remplir le frigo. Je reste un gars simple qui s’extasie plus devant un beau coucher de soleil que devant des zéros alignés sur un chèque.

Et si tout ça s’arrête un jour ?
Je n’en ferai pas une dépression ! Je sais que dans ce métier, on peut vous retirer le tapis rouge aussi vite que lorsqu’on l’a déroulé devant vous! Si demain l’audience de Mentalist s’effondre, je ne ferai pas de vieux os à l’écran! Hollywood n’a plus les moyens de jouer au philan thrope. Nous sommes dans une logique de marché. Si je ne rapporte pas assez, je dégagerai. J’en ai eu un petit aperçu quand je tournais dans Dossier Smith, une série qui n’a pas dépassé le cap des trois épisodes ! 

Vous semblez être quelqu’un qui a su garder la tête sur les épaules. Quel est votre secret?
Mes enfants sont mon point d’ancrage. Ma femme est mon rocher et ma source d’inspiration. C’est elle qui m’a structuré et m’a aidé à prendre mes responsabilités. Avant, j’avançais un peu dans le brouillard. A tâtons. Je souffrais d’une sorte de myopie intérieure.

«Mentalist» rencontre un grand succès en Europe, et on parle souvent de Patrick Jane comme du digne héritier de Columbo. Comment expliquez-vous que nous soyons si réceptifs à des personnages cérébraux ?
Je ne sais pas... C’est peut-être une affaire d’éducation ! (Rires.) Vous avez aussi toujours eu un gros faible pour les acteurs ou les gens décalés. Je pense notamment à Woody Allen ou Mickey Rourke, deux personnalités qui ne rentrent pas dans le moule. Personnellement, j’aime cette idée que la matière grise soit plus utilisée que le muscle ou la grosse artillerie. Et me comparer à Columbo, donc à Peter Falk, est à mes yeux un immense compliment !

N’avez-vous jamais envisagé de vous installer en Europe ?
Ma femme en rêve. Moi aussi, j’aimerais bien. La culture, la gastronomie, une certaine distance par rapport au travail : j’adore ! Vous n’êtes pas uniquement conditionnés par l’argent. Mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. J’aurais un peu l’impression de me jeter dans la gueule du loup !

Que voulez-vous dire ?
La plupart des demandes en mariage ou des déclarations d’amour enflammées que je reçois viennent d’Europe. 

Au fait, quel est votre niveau en français ?
Il est minable ! Je sais dire «merde» pratiquement sans accent, mais ce n’est pas avec ça que je vais pouvoir soutenir toute une conversation ! (Rires.)

 

Source

Ecrit par Totallyfan 
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